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Collaboration pour promouvoir les droits et l’auto-développement des Peuples Autochtones en Afrique

Une conversation avec Basiru Isa de REPALEAC sur les défis de la reconnaissance, les droits et les ressources naturelles des Peuples Autochtones.

En Afrique, les Peuples Autochtones font partie des populations les plus marginalisées, ils sont victimes de discriminations et sont exclus du processus décisionnel sur des questions cruciales pour eux. Leurs droits, notamment le droit à la terre, sont menacés et ils subissent les effets du changement climatique qui se manifeste par des sécheresses, des inondations et des sauterelles. Ils manquent d’infrastructures et de services sociaux de qualité, comme l’éducation et la santé. Tous ces défis sont aggravés par le fait qu’il existe une confusion sur la définition des Peuples Autochtones dans le contexte africain.

Pour travailler avec les Organisations de Peuples Autochtones sur la promotion des droits et de l’auto-développement en Afrique, la Fondation Autochtone de la FSC (FSC-IF), par le biais du programme Indigenous Peoples Alliance for Rights and Development (IPARD), crée un partenariat avec deux grandes plateformes de Peuples Autochtones en Afrique: le Réseau des populations Autochtones et locales pour la gestion durable des écosystèmes forestiers d’Afrique centrale (REPALEAC) et le Comité de coordination des Peuples Autochtones d’Afrique (IPACC).

La FSC-IF s’est entretenue avec le secrétaire général du REPALEAC, Basiru Isa, afin d’entendre son point de vue sur les Peuples Autochtones et les Communautés Locales (IPLC) en Afrique. Basiru est impliqué dans le REPALEAC depuis plus de dix ans et a maintenant la charge de la section technique et programmatique du réseau. Il est basé au Cameroun.

FSC-IF : Pouvez-vous nous parler du REPALEAC, de son plan stratégique et de sa vision ?

Basiru Isa : Le REPALEAC est le réseau des populations Autochtones et locales pour la gestion durable des écosystèmes forestiers d’Afrique Centrale. Il a été créé en 2003 à Kigali, au Rwanda, et est aujourd’hui un réseau régional de plus de 560 organisations de Peuples Autochtones qui en sont membres. Il opère dans huit pays : le Burundi, le Cameroun, le Gabon, la République centrafricaine, la République démocratique du Congo, la République du Congo, le Rwanda et le Tchad. Le REPALEAC dispose donc de huit réseaux internationaux qui travaillent au quotidien pour les intérêts des Peuples Autochtones dans leurs pays.

Le REPALEAC a développé en 2018 un plan stratégique qui s’étend de 2018 à 2025. Il comporte trois phases : la phase préparatoire (2018 – 2020), la phase d’opérationnalisation (2020 – 2021), puis celle de mise en œuvre (2022 – 2025). Ce plan stratégique comporte quatre axes stratégiques qui sont soutenus par des objectifs opérationnels.

Le premier axe est la sécurisation des terres, des territoires et des ressources naturelles. Cet axe comprend la reconnaissance des droits fonciers des Peuples Autochtones et la cartographie des terres des Peuples Autochtones. Le deuxième axe prioritaire est la participation des Peuples Autochtones dans la prise de décision, en particulier dans la gestion de leurs terres, forêts et ressources naturelles au niveau local, national et international. Le troisième axe prioritaire est la consolidation des bénéfices économiques obtenus par la gestion durable des ressources naturelles. Et le quatrième axe prioritaire est le renforcement durable des conditions de vie des Peuples Indigènes. Enfin, il y a un axe transversal qui traite du renforcement des capacités des organisations des Peuples Autochtones, et notamment du REPALEAC et de ses membres.

FSC-IF : Quels sont les défis à relever pour mettre en œuvre ce plan et les défis auxquels sont confrontés les Peuples Autochtones en Afrique ?

Basiru : Les défis sont nombreux mais ils ne dépassent pas la communauté internationale. Le premier défi est la reconnaissance des Peuples Autochtones par les Etats sur la base de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Peuples Autochtones. Aujourd’hui, avec le travail du REPALEAC, nous voyons des avancées dans certains pays, par exemple, la RDC est en train de voter une loi spécifique pour les droits des Peuples Autochtones. Au Cameroun, il existe déjà un plan de développement national pour les Peuples Autochtones. En République du Congo, une direction spécifique du ministère de la Justice est consacrée aux droits des Peuples Autochtones. Et récemment au Burundi, le plan de développement national pour les communautés Batwa a été validé.

Le défi consiste à faire comprendre aux pays que les Peuples Autochtones sont des personnes qui ont des spécificités car leur culture et leurs droits doivent être compris et respectés par les États. Le deuxième défi consiste à faciliter la mise en place de services sociaux adaptés aux besoins des Peuples Autochtones, par exemple l’accès à des écoles adaptées à leurs calendriers agricoles, de chasse ou pastoraux. Comment peuvent-ils concilier la scolarisation et le maintien de leur mode de vie traditionnel ? Un autre défi consiste à faire comprendre aux populations Autochtones elles-mêmes leurs spécificités, comment elles peuvent lutter pour leurs droits et comment nous pouvons les responsabiliser. Enfin, le dernier défi est de savoir comment mobiliser les ressources pour réaliser notre vision.

FSC-IF : Comment pouvons-nous surmonter ces défis ?

Basiru : Nous pouvons continuer à faire du lobbying et du plaidoyer au niveau national pour la reconnaissance des Peuples Autochtones. Ensuite, promouvoir la reconnaissance de leurs droits, notamment le droit à l’éducation, le droit à la terre, le droit aux ressources naturelles et le droit de participer à la prise de décision. Si vous regardez les axes du REPALEAC, nous travaillons dans ces domaines. Troisièmement, travailler avec les États et les donateurs pour voir comment nous pouvons mobiliser des ressources pour faire en sorte que les services fournis aux Peuples Autochtones soient adaptés à leurs normes culturelles et aussi autonomiser les communautés Autochtones. Je pense que ce sont là quelques-uns des efforts que nous pouvons essayer de faire.

meeting in Nairobi

FSC-IF : Comment envisagez-vous une collaboration avec la FSC-IF en Afrique ?

Basiru : Je pense que la FSC-IF est l’un des outils innovants les plus récents qui peuvent être utilisés pour changer la mentalité des communautés nationales et internationales, en particulier dans ce que nous appelons les plans de développement nationaux Autochtones. Du REPALEAC, nous envisageons une relation productive. Lorsque nous regardons les trois objectifs du Programme IPARD, ils s’alignent sur les cinq axes stratégiques du REPALEAC. Il existe donc une vision commune entre le REPALEAC et la FSC-IF et je pense qu’il est très facile pour nous de travailler ensemble.

FSC-IF : Comment cette collaboration répondra-t-elle aux défis auxquels sont confrontés les Peuples Autochtones en Afrique ?

Avec le développement d’un programme de développement des Peuples Autochtones en Afrique, beaucoup d’efforts seront consacrés au plaidoyer au niveau local, national et régional pour la reconnaissance des Peuples Autochtones. Ensuite, nous pouvons travailler sur des activités qui peuvent être directement mises en œuvre dans les communautés Autochtones. Enfin, nous pourrons voir comment, ensemble, nous pouvons mobiliser des ressources et renforcer les capacités des peuples, organisations et communautés Autochtones.

FSC-IF : Quelles sont les prochaines étapes ?

Basiru : Nous avons eu une discussion à long terme et une réunion en face à face à Nairobi. Maintenant, la prochaine étape est d’explorer un protocole d’accord et de définir nos prochaines actions ensemble.